La prudence extrême de Christine Lagarde

Par Auris Gestion

Seulement 5 semaines après sa dernière réunion, la BCE a, sans surprise, acté une nouvelle baisse de ses taux directeurs la semaine dernière, portant ainsi, notamment, le taux de dépôt à 3.25%. Si cette décision était très largement attendue, comme en témoigne le peu de réaction des marchés financiers, elle n’allait pourtant pas nécessairement de soi à la sortie de la réunion de politique monétaire de septembre dernier. Pour mémoire, de l’aveu même de Christine Lagarde, il était peu probable que les membres de la BCE baissent les taux en octobre car trop peu de nouvelles données seraient disponibles. Mais des chiffres d’inflation plus bas que prévus et une consommation européenne qui peine à repartir ont donc eu raison des (derniers) membres les plus hawkish de l’institution européenne.

Comme nous le mentionnons depuis quelques mois maintenant, la prudence extrême dont fait preuve Christine Lagarde à s’engager dans un processus clair de baisse des taux ne nous semble pas justifiée, notamment au regard de la faiblesse de la croissance européenne et des marges de manœuvre dont elle dispose avec des taux directeurs en territoire plus que restrictif. Bien que la présidente de la BCE semble infléchir son discours vers un ton plus accommodant, la frilosité dont elle fait preuve en s’enfermant dans la « data dependence » interpelle, d’autant que cette « data dependence » pourrait clairement lui permettre d’accélérer son rythme d’assouplissement monétaire. Il est ainsi intéressant d’observer que si, pour elle, la BCE n’a pas « encore brisée l’inflation », cela ne semble pas totalement être l’opinion du gouverneur de la banque de France, François Villeroy de Galhau, qui interpelle désormais sur le risque de voir l’inflation tomber sous la cible des 2% … Malgré les effets de base qui pourraient faire repartir marginalement l’inflation à la hausse sur la fin d’année, nous considérons que la question désormais n’est plus de savoir si la BCE baissera ses taux des 25 bps en décembre mais s’il existe une possibilité qu’elle les baisse de 50 bps.​

La BCE n’ayant pas eu d’impact sur les marchés, les investisseurs ont ainsi eu tout le loisir de se focaliser sur les données économiques américaines et particulièrement sur les ventes au détail. Celles-ci sont ressorties au-dessus des attentes et en accélération séquentielle sur le mois (+0.4% contre +0.3% attendu et +0.1% en août). Elles progressent également en volume (i.e. retraité des effets de l’augmentation des prix) et le « noyau dur » bondi même de +0.7% sur le mois, soit une variation annuelle à +4%, confirmant la très bonne tenue de la consommation américaine.

Ainsi, la résilience de l’économie américaine se poursuit. Couplée à un bon début de la saison des résultats et à la probabilité en hausse de la victoire de Trump, les actifs américains ont ainsi poursuivi leur marche en avant à l’image des indices boursiers ou du dollar.